Au 1er janvier 2018, la loi n°2017-1837 du 30 décembre 2017 a fixé de nouvelles exigences en matière de lutte contre la fraude à la TVA. Si les éditeurs de logiciel de caisses enregistreuses ou de gestion commerciale se sont retrouvés en première ligne reconnaissons que les éditeurs de solutions e-commerce ont plutôt été discret. Pourtant le e-commerce est bien aussi dans le scope d’application de cette loi. Faisons un point sur cette conformité des solutions e-commerce.
Le E-Commerce est partiellement concerné
Comme pour toutes lois pourquoi faire simple et imaginer une loi sans exception ni critères alambiqués. L’esprit de la loi est de ne plus pouvoir revenir sur une facture et de ne plus pouvoir modifier la TVA. Au départ c’était les logiciels de caisse de magasin et restaurant qui étaient dans la ligne de mire du gouvernement. A la lecture de la loi de Finance 2018 ,un passage intéresse tout particulièrement les professionnels du e-commerce : l’article 105 de la loi de finances, qui modifie l’article 286 du code général des impôts. OK Je lis… et je vous raconte ce que j’en déduis.
Si je titre que le e-commerce est partiellement concerné c’est que beaucoup de E-commerce ne sont pas, par statut,assujetti à la TVA. ceux qui n’ont qu’une activité BtoB utilisent déjà par ailleurs un système de facturation qui doit être certifié par l’administration fiscale.
Essayons d’y voir plus clair sur l’esprit de cette loi et surtout ses conséquences sur notre environnement économique et au passage je vous prie de noter à quel point il est important d’être conseillé et suivi par des professionnel de cette activité et que les gourous-apprenti-webmaster-aux-stes-pas-chers ne vous seront pas d’une grande utilité face à l’administration fiscale.( Je sais, une agence c’est comme assurance c’est toujours trop cher!)
Un site de E-commerce est il un logiciel de caisse?
« Les entreprises doivent désormais « utiliser un logiciel ou un système satisfaisant à des conditions d’inaltérabilité, de sécurisation, de conservation et d’archivage des données en vue du contrôle de l’administration fiscale, attestées par un certificat délivré par un organisme accrédité dans les conditions prévues à l’article L. 433-4 du code de la consommation ou par une attestation individuelle de l’éditeur, conforme à un modèle fixé par l’administration ».
Concrètement, les entreprises qui vendent des biens et services vont devoir s’équiper d’un logiciel de caisse certifié. Ces logiciels pourront obtenir une certification officielle ou proposer une attestation individuelle à leurs clients, à condition de respecter un modèle fourni par l’administration. La direction générale des Finances publiques (DGFiP) précise sur son site que les sites e-commerce sont concernés, puisque « le dispositif vise, sauf exception, tout assujetti à la TVA en France qui enregistre les règlements de ses clients au moyen d’un logiciel ou système de caisse ».
« Un logiciel de gestion qui permet l’enregistrement des opérations de ventes ou de prestations de services qui concernent les non assujettis à la TVA (clients particuliers) doit être considéré comme un logiciel ou un système de caisse visé par le dispositif. »
Donc un site E-commerce est il un logiciel de caisse et a ce titre est il concerné par cette loi? La réponse est donc clairement oui.
Cette loi indique que les logiciels de caisse (dont font partie les CMS de e-commerce) devront, au 1 janvier 2018, présenter les caractéristiques suivantes :
- inaltérabilité des données
- sécurisation des données
- conservation des données
- archivage des données
Elle stipule que chaque entreprise concernée devra obtenir un certificat, ou une attestation, individuel et nominatif pour chacun des « logiciels de caisse » qu’elle utilise.
Tous les statuts sont ils concernés?
Cela aurait bien trop simple de dire oui ou non, et comme il faut bien donner du travail aux entreprises de consulting le législateur dans sa bienveillance n’a pas oublié de la ciseler pour la rendre plus proche des réalités du terrain, mais du coup, on ne s’y retrouve plus.
La loi ne concerne que les E-commercants assujettis à la TVA. L’obligation d’avoir un logiciel de caisse certifié conforme ne s’applique pas :
- aux auto-entrepreneurs en dessous des seuils de TVA,
- aux entreprises non assujetties à la TVA,
- aux entreprises qui émettent des factures nominatives,
- aux entreprises travaillant exclusivement en BtoB puisque l’obligation d’émission de facture leur ai déjà imposé?
Toutes les solutions E-commerce sont elles à la norme?
Après avoir lu les nombreuses pages de la loi de finance, il apparaît que le risque de non conformité est plus important sur tous les sites utilisant des solutions Open Source (Prestashop, Magento, WordPress, Jomlaa,…) Prestashop a par ailleurs entamé une démarche de certification et développe un module intégré à sa solution qui fera l’objet d’une certification et qui permettra a ses utilisateurs d’être en conformité. Oui mais… la définition même de l’opensource est d’avoir un accès libre et total à l’intégralité du code. Cela est il compatible avec l’inaltérabilité des données, la sécurisation des données leur conservation? D’autant plus que par mesure d’économie bon nombre de webmasters professionnel ou particulier utilisent des hébergements pas chers mais mutualisé, non sauvegardé et donc la sécurisation des serveurs est souvent à la hauteur du prix annuel qu’ils proposent( quelques dizaines d’euros par an!!!!!!)
Qu’adviendra t il de la certification à laquelle Prestashop et les autres postulent si la solution e-commerce est un assemblage de modules développé par nombres de prestataires différents qui ont n’auront jamais la possibilité d’obtenir et de délivrer la moindre attestation.
Que se passera t il aussi en cas de mise à disposition d’une mise à jour majeure de la solution ou de l’un de ses modules?
La nature de l’hébergement de la solution est aussi en prendre en compte notamment sur les aspects sécurisation et archivage comme le stipule le texte cf doc BOI-TVA-DECLA-30-10-30, point 160 220 et 320.
Les sites de E-commerce exploitant une solution open source sont tout de même la très grande majorité de cette activité. Lafabriquedunet.fr estime même que les solutions open source représenteraient 83% de part de marché des sites de E-commerce.
Les solutions open-sources dans le collimateur?
Les logiciels open-source (et les logiciels développés en interne) ne seront pas certifiables, ou tout au moins pas à des coûts acceptables pour des TPE ou des PME. La loi interdit de fait aux TPE et PME de mettre en place et d’adapter un CMS Open-source, ou d’écrire leur propre logiciel de e-commerce. Les sites de e-commerce utilisant ces solutions se trouvent dans l’impossibilité de se mettre en conformité avec les obligations de la loi, avec pour conséquence une amende de 7 500€ tous les 60 jours.
Et les solutions SAAS?
A cette heure je ne crois pas en connaitre une qui est en mesure de fournir le moindre certificat mais par la nature même de leurs prestations elles seront les grandes gagnantes de cette nouvelle contrainte administrative imposée aux entrepreneurs. Oxatis (une des solutions que nous intégrons depuis 2009) a publié sur son site un billet concernant la certification de sa solution Ecommerce grace au SAAS et à la Blockchain. Powerboutique, Shop-application wizishop etc. vont sans doute passer à l’offensive de communication car par nature elles onbtiendront plus rapidement que les autres ces fameux certificats qui leur permettront de délivrer les attestations attendues par tous les e-commerçants.
Sur la solution Oxatis que nous exploitons depuis des années un journal comptable est accessible, non altérable et archivé pour permettre aux e-commerçants de justifier de la totalité de leurs données comptables depuis le début de leur exercice. C’est ce que l’on appelle une piste d’audit fiable.
Shop application est en avance sur ce sujet: A lire sur cette page , il semblerait que cet éditeur ait devancé tout le monde en permettant à ses utilisateurs d’imprimer eux même leur certificat de conformité. Un exemple donc a suivre. Nous mettrons à jour ce chapitre pour signaler toutes les solutions e-commerce qui a ce jour peuvent garantir à leurs utilisateurs de la conformité de leur solution aux exigences de la fiscalité française.
Que faire maintenant?
Pas de panique l’administration a prévu d’accompagner toutes cette année les entrepreneurs dans cette démarche. Cela veut dire que les sanctions ne sont pas immédiates mais pour autant elles restent une menace à terme pour la santé de nos entreprises et notamment les plus fragiles.
On peut toujours fractionner son activité afin de se retrouver en dessous des seuils pour être en franchis de TVA ( 82800€ de CA pour le moment), ou changer son statut juridique mais tout cela ne semble pas bien sérieux si l’on veut vraiment développer son activité dans un cadre légal et apaisé
Si vous avez des doutes sur votre situation vous avez toujours la possibilité d’avoir une réponse formelle de l’administration au moyen de la procédure de « rescrit fiscal« .
Cette procédure, gratuite, oblige l’administration à vous fournir une réponse écrite sous 3 mois. Je ne suis pas sûr que cette réponse vous plaise, mais au moins vous n’aurez plus aucun doute.
En tous cas cela montre que le secteur du E-commerce est en perpétuel changement et que dans ce contexte une analyse indépendante, bienveillante et permanente est utile. Pour faire cela le mieux est donc de vous abonner gratuitement au FIL d’ID notre mensuel de conseils.
Pour aller plus loin.
J’ai mis dans cet article quelques sources que je vous engage à lire. Vous trouverez aussi sur le forum magento des questions de mes confrères autour cette conformité qui a mon sens va bouleverser bien plus notre éco-système que ne le fera le RGPD et pourtant il y a moins de sources à lire sur ce sujet. Comme cité dans mon article Prestashop se retrouve bien malgré lui a gérer cette nouvelle contrainte et s’exprime ici.
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